Tripalium

Mes yeux s’ouvrent
Le vent contrarié vient s’échouer sur mes volets
Mes yeux s’ouvrent
Le ciel est gris aujourd’hui mais je ne suis pas attristé
Mes yeux s’ouvrent ce matin
Je suis même content, qu’il est bon et reposant qu’il soit maussade de temps à autre
Les yeux s’ouvrent ce matin
Et dame anxiété vient me saisir, mes droits-chômage sont quasi épuisés
Mais par où puis-je commencer ?
L’asservissement au travail, encore et toujours.
Alors qu’à peine je découvre ce que sont oisiveté et érudition
Alors qu’à peine je découvre sens à mon humanité
Alors qu’à peine je découvre qu’il faudrait délaisser tous ces vices pour m’élever

Je dois retourner travailler et souffrir.

Promettre à mon employeur que je suis souriant, énergique, sagace mais surtout compétent
Je lui mentirai droit dans les yeux, sourire aux lèvres
Le suppliant silencieusement du fond de mon être qu’il fasse preuve de bonté en acceptant de me prendre mais surtout de payer mon écu chaque jour afin que je puisse me procurer un peu de pain pardiou !

Rien n’a changé depuis tout ce temps, les conditions de travail sont juste devenues un peu plus acceptables
Nous vendons toujours notre force de travail et nous sommes toujours asservis

Ô combien de petit patron ai-je-vu, tout sourire, vous faisant pourrir en salle d’attente, vous accordant un entretien comme privilège.
Le moment venu, plein de stress, vous lui prendrez les roupettes lui montrant avec volupté, que ce qu’il a accompli est exceptionnel, que vous avez correctement appris la leçon, qu’il est bon de vous prendre car vous saurez vous soumettre parfaitement, ne ferez pas de vague

Je n’ai pas envie de ça

Car le masque tomberait bien vite, je me lasserais, je serais en retard, je mettrais tout en œuvre pour que ce travail insupportable, le devienne un peu plus
Il verrait de plein fouet ô combien je lui ai menti
Il verrait de plein fouet ô combien je l’ai dupé

Douce oisiveté, tu vas me manquer

André

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